200 ans d’écriture braille: sept faits étonnants au sujet des si géniaux «points saillants».

Le Français Louis Braille (1809 – 1852) est devenu complètement aveugle à l’âge de cinq ans et a commencé peu de temps après à réfléchir à la manière de continuer à lire de manière autonome. Il a fait des expériences avec des morceaux de cuir et a simplifié et optimisé des écritures existantes qu’il avait apprises à l’école pour aveugles. À l’âge de 16 ans, il avait déjà achevé son système – sous la forme que nous lui connaissons encore aujourd’hui. Mais il faudra encore des décennies avant que son écriture ne s’impose. Elle fut interdite à l’école pour aveugles et dans les conférences, où plus tard il la démontrait, personne ne croyait qu’il lisait «en direct», persuadés qu’il avait appris les textes par cœur. Ce n’est qu’en 1850, deux ans avant la mort de Louis, que l’écriture braille est devenue un objet d’enseignement dans les écoles françaises pour aveugles. Louis Braille n’aura pas su la percée internationale de son écriture.

Le système du braille peut être qualifié de génial en toute bonne conscience. A l’inverse de notre écriture noire, le braille est logique de bout en bout; il fonctionne de manière binaire comme un ordinateur. Avec seulement six points saillants, disposés en deux rangées verticales de trois points chacune, le braille peut représenter 64 caractères différents. Comme on peut le voir sur l’image, les caractères sont répartis en groupes logiques. Pour ceux qui veulent en savoir plus – cela vaut la curiosité! – un alphabet braille complet se trouve dans les téléchargements.

Grâce à ses nombreuses combinaisons, le braille est très international. Il n’est pas seulement utilisé dans tous les pays où l’on pratique l’écriture latine (les caractères spéciaux sont alors doublés). Même dans les langues dont l’écriture noire est très particulière, les aveugles utilisent le braille. C’est le cas de l’arabe, dont les signes représentent des syllabes et qui se lit de droite à gauche, du russe, du chinois, du japonais, etc. Plus le système d’écriture est complexe, plus les adaptations nécessaires sont importantes. Mais le braille est également la version la plus populaire d’une écriture pour les personnes aveugles et malvoyantes dans ces espaces linguistiques. Les seules exceptions sont certaines langues indigènes qui n’ont pas de système d’écriture établi. Et l’utilisation du braille va encore plus loin: il existe également des notations en braille pour les partitions de musique ou les mathématiques, et même une écriture braille pour les échecs et le tricot.

Comme le braille est structuré de manière si logique, une machine à écrire braille a pu être inventée très tôt – elle aussi d’une simplicité remarquable: avec seulement six touches, c’est-à-dire une touche pour chacun des six points du braille, il est possible de taper les 64 combinaisons. Ce système est si pratique que de nombreuses personnes aveugles le préfèrent aux claviers ordinaires. Sur la plupart des téléphones portables, le système d’exploitation offre donc déjà la possibilité de passer à un clavier braille qui reproduit le clavier d’une machine à écrire braille. Les messages ainsi tapés sont ensuite traduits en noir par le téléphone portable.

Lorsque les premiers PC sont arrivés sur le marché, ils ont très vite été utilisables par les personnes aveugles, grâce à la ligne braille, brevetée dès 1978. La ligne braille est connectée au bas du clavier: de petits «picots» se lèvent et s’abaissent reproduisant caractère pour caractère ce qui affiché en texte ordinaire à l’écran. C’est essentiel pour vérifier la bonne rédaction du texte et son orthographe. Grâce à la ligne braille, l’informatique a été enseignée très tôt dans les écoles spécialisées, et les personnes aveugles d’alors ont ainsi bénéficié d’un avantage sur le marché informatisé du travail: aux premiers temps des PC, nombre d’entre elles pouvaient déjà travailler efficacement avec leur PC, alors que les collaborateurs voyants étaient pour longtemps encore à l’ère de la machine à écrire.

Bien que l’écriture braille soit multifacettes, il existe une alternative également assez connue: L’écriture dite «en relief». Ses lettres ressemblent à celles de l’écriture noire et sont conçues comme des bosses palpables. Ce sont surtout les personnes qui perdent la vue tardivement qui l’apprennent à la place du braille: celle ou celui qui a été habitué-e toute sa vie à l’alphabet latin peut avoir du mal à apprendre un autre système sur le tard. De plus, le braille, avec ses points fins, exige une très bonne sensibilité des doigts. Avec l’âge, mais aussi en cas de certaines maladies ou de travail manuel, la sensibilité dans les doigts peut diminuer. L’écriture en relief nécessite toutefois beaucoup plus de place que le braille, car les différentes lettres ne sont palpables qu’en grande taille. Et la lecture est plus longue et plus compliquée, car elle n’est pas optimisée pour le sens du toucher. Le relief est donc surtout utilisé pour des mots isolés ou des textes courts, par exemple dans les ascenseurs ou sur les panneaux.

Les lecteurs d’écran et les applications de reconnaissance de texte peuvent certes faire beaucoup aujourd’hui: ils lisent à haute voix n’importe quel texte numérique, et grâce à l’IA, ils peuvent aussi déchiffrer de plus en plus de textes du quotidien comme les emballages ou les sonnettes de porte. Mais le braille leur est tout de même supérieur dans de nombreux domaines.

• Il existe différents types d’acquisition de l’information: De nombreuses personnes ne peuvent pas mémoriser de longs textes en les entendant seulement.
• Même si l’on apprend bien à l’oreille, il est utile pour tous de pouvoir lire deux fois un mot dans un texte compliqué, de recommencer une phrase depuis le début ou de lire quelque chose deux lignes plus haut. Avec le braille, cela se fait comme avec l’écriture noire; avec les lecteurs d’écran, il faut chercher péniblement le passage souhaité. C’est pour cette raison que notre magazine fédératif «Clin d’œil» est toujours imprimé en braille, ce que nos membres et étudiant-e-s en braille apprécient beaucoup.
• Il en va de même pour le reste: la lecture est généralement plus rapide et moins compliquée que l’audition. De nombreuses personnes aveugles utilisent le braille à la maison pour étiqueter leurs médicaments, leurs épices ou leurs vêtements (il existe pour cela des étiquettes autocollantes très pratiques) – il serait beaucoup plus compliqué de lire à chaque fois avec un téléphone portable. Le braille est également indispensable pour s’orienter dans l’espace public: boutons d’ascenseurs, panneaux indicateurs, quais de gare, arrêts de bus, etc. sont inscrits en braille et les personnes aveugles s’y retrouvent beaucoup plus rapidement.